vendredi 1 mars 2013

Projet HAARP. Guerre géo-climatique ou légende urbaine?


Projet HAARP. Gakona, Alaska
PROJET HAARP. GUERRE GÉO-CLIMATIQUE OU LÉGENDE URBAINE?

J’ai toujours éprouvé beaucoup de suspicion lorsqu’on me parlait des innombrables et sanglants complots de la C.I.A. du K.G.B. ou encore du MOSSAD. Si la réalité, comme le veut le proverbe, dépasse la fiction, alors ces institutions vont au-delà de toutes les terreurs possibles. D’autre part, si cet autre proverbe a également sa part de vérité - on ne prête qu’aux riches -, c’est tout aussi effrayant. Les romans d’espionnage, les films du même genre, les témoignages à vous faire dresser le poil sur les avant-bras, il n’est pas étonnant qu’on en vienne à ne plus savoir exactement quoi penser. Devenons-nous collectivement paranoïaques, ou conservons-nous assez de jugement critique pour savoir distinguer la réalité de la fiction? Et si tout s’embrouille, comme dans un terrible cauchemar labyrinthique, alors nous n’avons plus qu’à nous abandonner aux forces obscures du destin.

Il en va ainsi du projet HAARP. Depuis près de trente ans, cette opération de surveillance de la ionosphère - la couche la plus haute de l’atmosphère terrestre, celle qui arrête les effets nocifs du soleil avant qu’ils ne parviennent au sol -, suscite des questions et des fantaisies où il est difficile d'évaluer la part du vrai et celle du faux. Commençons donc par la définition la plus banale du projet. HAARP, c’est le projet High Frequency Active Auroral Research Program, un programme américain à la fois scientifique et militaire de recherche sur l'ionosphère. Ses activités dépendent de la base aérienne de Kirtland AFB et sont financées conjointement par l'armée de l'air et la marine des États-Unis, ses activités scientifiques étant gérées par l'Université d'Alaska et sa mise en œuvre par le laboratoire Phillips de l'US Air Force et l'Office of Naval Research. Son objet de recherche met donc en cause non seulement l’ionosphère, mais l’ensemble de l’atmosphère terrestre à l’aide d’instruments de recherche ionosphérique et des techniques radioélectriques dit-on inspirées des recherches de Nicolas Tesla, un physicien de haute réputation, mais aussi des projets ambitieux et un tantinet fantastiques du premier XXe siècle. Le but avoué de l’entreprise est de comprendre les mécanismes complexes qui régissent l’ionosphère, la haute atmosphère. Ainsi, utilisant des ondes de haute fréquence (HF), les chercheurs étudient l’impact de l’ionosphère sur les communications à longue distance. C’est dans cet esprit que les institutions militaires américaines établirent leur principale base HAARP en Alaska, face à une Russie, qui était encore URSS, afin de dérouter des missiles ou des engins balistiques par des ondes réfractées par l’ionosphère.

Une base HAARP ressemble à une forêt de pylônes qui constitue une gigantesque antenne. «L'installation utilise un réseau d'antennes comportant 180 antennes dipôle. La puissance rayonnée est de 3,6 MW PEP pour une puissance ERP (puissance irradiée) maximale allant de 420 à 3800 MW, selon la fréquence (respec-tivement de 2,75 à 9,5 MHz). La gamme de fréquence HF utilisable sur cette installation s'étendant en effet de 2,75 à 10 MHz. Occasion-nellement les radioamateurs sont amenés à participer à ce projet en communiquant des rapports d'écoute lors de tests effectués sur 3.3, 3.39 et 6.99 MHz». Un premier champ d’antennes a été ouvert près de Gakona, en Alaska, à un coût estimé à 30 millions de dollars. Un autre champ tout proche de Fairbanks, en Alaska encore, la station HIPAS et un troisième près de l’observatoire d’Arecibo à Porto Rico, sont les trois installations américaines du projet. De plus, les Européens ont érigé une forêt semblable près de Tromsø, en Norvège, EISCAT, dotée d’une puissance maximale de 1200 MW (ERP), tandis qu’une station similaire se trouve en Russie près de Nijni Novgorod, avec une puissance maximale de 280 MW (ERP), la station Sura. Semble-t-il que d’autres bases seraient disséminées un peu partout dans le monde, avec des puissances beaucoup moins grandes.

Si nous nous en tenons aux déclarations officielles du gouvernement américain, de telles installations n'auraient pour objectif que d'étudier les propriétés de l'ionosphère, en particulier, comment les pertur-bations de cette couche de la haute atmosphère par les orages magnétiques affectent les commu-nications radio mondiales, les systèmes de navigation par satellite ainsi que les réseaux de transport d'électricité sur de longues distances. Jusque-là, il n’y aurait pas de quoi fouetter un chat, mais lorsque l’on apprend que dans ces installations, les chercheurs «tentent aussi de produire de petits changements [climatiques] temporaires sur une région limitée, directement au-dessus du site d'investigation, qui, en aucun cas, ne peut être comparable aux phénomènes globaux provoqués par les perturbations solaires», les esprits commencent à s’échauffer. «Les instruments, d'une sensibilité extraordinaire, installés à l'observatoire HAARP permettent de faire des corrélations détaillées à partir des effets limités ainsi produits, permettant une meilleure compréhension de la façon dont l'ionosphère répond à une grande variété de phénomènes naturels». Déjà HAARP est engagé dans la modification volontaire du climat. On ne parle plus des effets secondaires du réchauffement climatique ou de l’usure de la couche d’ozone, mais d'orages magnétiques, voire d'un Frankenstorm comme Sandy, qui, selon beaucoup de personnes, serait un pur produit de HAARP.

Les autorités conviennent qu’avec l'excitation locale de l'ionosphère par hautes fréquences et la modulation du signal, HAARP est en mesure de faire de la basse atmosphère une antenne ELF/VLF (Extremely Low Frequency/Very Low Frequency) virtuelle, grâce au fait qu'à proximité des régions polaires et équatoriales existent des courants électriques naturels nommés électrojets. La modification de la conductivité électrique de l'ionosphère par HAARP permet d'agir sur l'électrojet polaire, permettant de s'en servir pour la génération d'ondes ELF. Ainsi, il existe plusieurs méthodes de modulation des Hautes Fréquences pour la génération d'ELF. Il y a la modulation d'amplitude (ex: marche-arrêt), et la modulation géométrique (déplacement cyclique de la zone irradiée selon la fréquence). Il existe aussi une méthode nommée «beam painting» (irradiation rapide de différentes parties d'une plus large zone puis refroidissement avant reprise du cycle). La production d'ELF n'est qu'une des nombreuses possibilités offertes par l'interaction de HAARP avec l'ionosphère, qui recouvre des aspects aussi bien militaires que scientifiques. Des chercheurs de nombreuses universités, américaines ou non, ont été ou sont encore associés à divers projets de recherches HAARP, ce qui a donné lieu à plusieurs publications. Par exemple, en décembre 2004, deux chercheurs américains ont publié dans la revue Nature les résultats d'une expérience au cours de laquelle ils ont pour la première fois créé une tache lumineuse verte visible à l'œil nu (Wikipedia), c’est-à-dire une aurore boréale purement artificielle.

Si nous arrêtions ici la description du projet HAARP, nous aurions déjà suffisamment de matériel pour susciter une certaine inquiétude. Mon père, qui n’avait aucune notion scientifique en tête et qui affirmait que le fait que les hommes aient mis le pied sur la lune suffisait à changer le climat du tout au tout, aurait atteint le plus haut degré de paranoïa s'il avait lu lle livre publié en 1995 par Nick Begich et Jeane Manning, Les anges ne jouent pas de cette HAARP. Le jeu de mots est facile, mais ce que prétendent les auteurs ouvre sur une situation horrifiante : «la capacité d'HAARP à influencer l'ionosphère serait beaucoup plus importante qu'admise officiellement. Selon eux, ces 180 antennes permettraient un jour de faire des recherches pour pouvoir modifier le climat, interrompre toute forme de communication hertzienne, détruire ou détourner avions et missiles transcontinentaux et finalement, influencer les comportements humains, tout cela via des actions sur l'ionosphère». Décidément, disait ce bon vieux Talleyrand, «tout ce qui est exagéré est insignifiant», mais nous verrons plus loin qu’au contraire, ici, l'exagération fait sens. «En 1999, un rapport de la commission des affaires étrangères, de la sécurité et de la politique de défense du Parlement européen reprenait une partie de ces assertions en mentionnant que «le système militaire américain de manipulation ionosphérique, HAARP, lequel est basé en Alaska et ne représente qu'une partie du développement et de l'usage d'armes électromagnétiques à des fins de sécurité tant extérieure qu'intérieure, constitue un exemple d'une nouvelle menace militaire particulièrement grave pour l'environnement et la santé humaine au niveau planétaire». L’utilisation sur l'angoisse paranoïde occidentale des armements techniques, même entre alliés, révèle qu’il y a là des enjeux qui sont loin d’être innocents. Si rien ne prouve la réalité de ces assertions fantastiques (ou fantaisistes), par contre on ne doit pas tenir pour une garantie le fait que les États-Unis soient partie liée à une convention internationale interdisant ce genre de pratiques.

La manipulation du climat ferait-elle son entrée parmi les armes de destruction massive? En focalisant sur des points locaux particuliers la capacité de créer des ouragans du genre de Sandy, qui a frappé la côte est américaine au cours de l’automne 2012, peut-on causer des destructions comparables aux pires bombardements du passé? Certains partisans de la théorie du complot décrivent, à partir de photosatellites, des ondes dans l'ionosphère qui auraient modulé les séquences du développement de l’ouragan Sandy, qui serait ainsi un véritable Frankenstorm dans la mesure où il serait le produit de HAARP et de la nature. Si l'on peut croire à une telle affirmation, pourquoi ne pas inclure aussi Katrina et les autres ouragans qui ont sévèrement balayé les Antilles et le Golfe du Mexique au cours des dernières années? Nous ne sommes pas très loin d’un phénomène comme le triangle des Bermudes, si populaire dans les années 70, et qui semble être maintenant une légende urbaine usée et risible.


Toute une série de vidéos sur You Tube présentée par Anti Nouvel Ordre mondial et intitulée Pour détruire l’humanité, série qui remonte à la fin des années 1990, ramasse l’ensemble de la dénonciation de HAARP. Mais, dès le début de la première vidéo (http://www.dailymotion.com/video/xhpgzy_projet-haarp-pour-detruire-l-humanite-1sur5_tech), la terreur s'installe par des affirmations aussi douteuses qu’effrayantes de la part du narrateur : «Aujourd’hui, la terre est plus instable, elle vacille plus qu’avant, l’atmosphère s’accélère (?) et la terre ralentit, le noyau terrestre devient plus chaud, le pôle nord magnétique change, le soleil est plus actif et plus âgé que nous l’avons cru. Tout est plus imprévisible et les hommes semblent vouloir pousser les choses à leurs extrêmes limites». En elle-même, ces affirmations apocalyptiques mettent la table pour tout ce qui va venir par après. HAARP devient la conspiration géophysique d’esprits qui pourraient avoir de mauvais desseins pour l’humanité. Un Hitler ou un Staline, par exemple. Bientôt, le danger est étendu à la manipulation des conduites humaines. Les ondes à basse fréquence, manipulées depuis la ionosphère, pénètreraient notre cerveau, nous amenant à poser des gestes insolites ou dangereux. On aura reconnu là toute la tradition de la théorie du complot depuis les Monita Secreta Societas ou le rôle prêté aux Illuminati dans l’origine de la Révolution française par l’abbé Barruel.

HAARP s’inscrirait dans la démarche inaugurée par le savant serbe Nicolas Tesla (1856-1943), un génie chez qui se mêlait la connaissance poussée de la physique et les projets les plus sensationnels, comme ce «rayon de la mort» qui serait porté par des ondes projetées sur une longue distance dans l'atmosphère pour créer un effet dévastateur à distance. Ainsi, la destruction de la forêt de Tunguska, en Sibérie, en 1908 aurait été le résultat des expériences de Tesla sur ce «rayon de la mort» alors qu'il travaillait aux États-Unis. Tesla jouerait auprès de HAARP le rôle qu’on prête à Einstein et à Oppenheimer pour la bombe atomique. Contrairement à Edison, qui lui vola plusieurs de ses inventions lorsqu'il était à son service, la personnalité de Tesla fut vite récupérée par le roman de science-fiction, la bande dessinée et le cinéma fantastique. Suivant le principe du courant alternatif développé par Tesla, la haute antenne érigée pour HAARP capte la fréquence radio qui est orientée dans la haute atmosphère pour simuler le rôle du soleil. Ainsi, HAARP pourrait aussi bien reproduire les effets d'éruptions solaires sur les réseaux de distribution d’électricité que brouiller les commandes d'avion ou de sous-marin et augmenter la chaleur même de l’ionosphère jusqu'à multiplier les effets de foudre sur le sol.

HAARP aurait aussi ses attraits économiques. Ces fréquences projetées dans l’ionosphère reviennent sur la terre et pénètrent le sol en profondeur. Comme un sonar, elles détectent en les identifiant soigneusement les filons de métaux ou d'éléments chimiques dans le sous-sol. HAARP serait le tamis des nouveaux chercheurs d’or qui ont ajouté à l’or l’uranium, le pétrole, les poches de gaz, etc. Il suffit de modifier les fréquences - de préférence les basses fréquences - tout en orientant les antennes afin de balayer des zones importantes du sous-sol. L’élévation des fréquences suffirait à créer des tremblements de terre et à attaquer les plaques tectoniques. De la guerre climatique, nous passons à la guerre géophysique : provoquer des séismes, des éruptions volcaniques et des tsunami chez l’adversaire économique, politique ou militaire. Voilà un échafaudage de la guerre au XXIe siècle beaucoup plus qu’une fantaisie eschatologique de bandes dessinées ou un scénario de film-catastrophe.

Selon cette vision du projet HAARP, celui-ci se servirait de l’ionosphère comme d'un amplificateur et un moyen d’émission, ou plutôt s'en servirait pour diffuser un signal et l’amplifier afin de le rendre plus intense, des milliers de fois plus intense, et de lui faire couvrir un plus grand espace sur la terre. Comme on le voit, c’est la poursuite du «rayon de la mort» de Tesla. La conjoncture des ondes à basse fréquence et de celles du cerveau humain ajoute l'horreur finale à Pour détruire l’humanité.

Bien entendu, les sceptiques ne se reconnaissent pas confondus et dénoncent les animateurs de la série vidéo comme des gens au passé ésotérique, usant des légendes urbaines tissées autour des OVNI et autres métissages de superstitions et de haute technologie futuriste. Il faut reconnaître que cette vidéo a péniblement vieilli et l’on n’aurait sans doute pas ressuscité les exagérations au sujet de HAARP s’il n’y avait eu Sandy. HAARP, ce dérivé de la guerre des étoiles, est un projet qui stimule les angoisses vitales de la civilisation occidentale. Au-delà de la fascination pour les anecdotes occultes, il y a les inquiétudes réelles liées à la négligence du dévelop-pement économique sur l'état de la planète. Le déni du réchauf-fement climatique est compensé par la croyance aux manipulations militaires de l’atmosphère. C’est une tradition américaine que de nier l’évidence des faits de nature pour en rejeter la responsabilité sur les malversations de l’État. Si un quelconque cataclysme devait se produire sur terre, encore plus dévastateur que le tremblement de terre qui a frappé voilà deux ans les côtes du Japon et le tsunami qui l'a suivi, la cause pourrait tout aussi bien être attribuée aux actions incontrôlées de HAARP. L’angoisse vitale complète son antithèse, l’angoisse métaphysique, jumelant le démon non plus aux séismes et aux volcans, mais aux intérêts militaires à la cupidité de la recherche d’or et d’or noir. La série des films de Spielberg sur les manipulations génétiques qui ramènent à la vie les dinosaures campés dans une île comme dans un immense disneyland pour enfants relève de ce même type de névrose obsidionale. Le mauvais génie qui hante les hommes les conduit à leur perte. La nature, qui est en l’homme comme à l’extérieur, est ainsi frappée. Les ondes de basse fréquence modifieront les comportements humains comme ils dérègleront l’ordre climatique. C’est ici que la légende urbaine se revêt d’un sens qui répète celui du discours des écologistes les plus engagés : la destruction de la nature conduit nécessairement à la destruction de l’homme. L’effet formel du reportage apocalyptique est là pour insuffler la vérité de cette maxime. Si les chiffres qui accompagnent la destruction de la forêt amazonienne ne suffisent pas, ceux, encore plus formidables, des mégahertz projetés dans l'ionosphère par l’antenne de Gakona et les effets spectaculaires dans le ciel annonceront, à l’exemple de l’Apocalypse de Jean, ces signes de l’avènement de la fin des temps⌛
Montréal
1er mars 2013

Corrigé par Marc Collin

1 commentaire:

  1. Pour compléter cet article il faut dire qu'on se doit tous de porter un casque fait en papier d'aluminium sur la tête afin de nous prémunir des influences néfastes de HAARP et des micro-ondes, qui sont maintenant partout, et qui donnent le cancer du cerveau.

    Fait à noter, plusieurs croient dur comme fer deux choses au sujet des micro-ondes :
    - que c'est une technologie tellement incroyable du fait qu'elles ne font que chauffer les aliments et non les contenants que c'est sûrement un truc d'origine extraterrestre, et ;
    - que les micro-ondes sont radio-actives d'où l'expression américaine de "to nuke" (de nuclear) pour faire réchauffer des aliments au micro-ondes.

    Les ondes, les virus, dieu... tout ce qui est invisible peut tuer.

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